Franz Liszt ‒ Sources du concert n° 361

[Lettre d’Alphonse de Lamartine à Joseph Havin, à Paris

Paris, mardi 4 juin 1861]

XXII

A Monsieur Havin, directeur du Siècle.

Paris, 4 juin 1861.   

      Mon cher collègue et ami,

   Soyez-moi en aide, comme vous l’avez été tant de fois. Voici le fait : un homme que tout le monde se dispute, parce que sa main sème des miracles à pleines notes, M. Liszt, a bien voulu, en mémoire d’une ancienne liaison, m’offrir de faire apporter son piano chez moi demain. J’ai averti de cette bonne fortune quelques admirateurs de son génie, par vingt-cinq billets confidentiels, Odi profanum ! — Je ne sais par quelle méprise, on a transformé cette invitation très intime et très restreinte en une convocation publique dans une annonce ! Sauvez-moi vite en le démentant. Ma maison danserait dans celle de Socrate ! et comme les amis de la musique sont plus nombreux que ceux de la sagesse, et que nous ne sommes plus au temps des fables, les mélodies de l’ancien Amphion, qui bâtissaient des villes, pourraient bien ne pas suffire aujourd’hui à élargir les murs de dix pieds carrés de mon étroit salon. Merci d’avance.