Sources

Franz Liszt ‒ Sources du concert n° 211

L’Orléanais, 11e année, no 33, dimanche 25 avril 1841, p. 2

Chronique musicale.

 

   — Nous pouvons annoncer à nos lecteurs, comme une chose certaine, que le concert de Listz aura lieu sans faute après demain soir, mardi 27 avril, dans la salle du Jeu-de-Paume.

   On nous prie d’insérer, à ce sujet, la note suivante :

   « La dénomination de stalles, premier rang, désignée sur les affiches du concert de M. Liszt, ayant été l’objet de quelques discussions, nous croyons devoir faire savoir positivement que ce n’est que d’après les avis et les instances de plusieurs amateurs et artistes de notre ville, qui ont manifesté le désir de voir de près l’exécutant, qu’on a établi des places réservées, ces places devront même être retenues d’avance afin d’être numérotées ; il n’y aura donc aucune distinction, toutes les autres place seront à quatre francs. »

   — LaMode, dont le goût est si sûr, apprécie ainsi le talent de M. Listz :

   « Silence, soyons tout attention et tout oreille, reposez-vous dans une contemplation muette, entendez-vous, dans le lointain, ce doux murmure, ce frémissement intérieur, entendez-vous venir cette tempête sonore, elle arrive, elle est là, elle frappe à votre âme, elle se précipite toute palpitante ; encore une fois, silence : entendez-vous, c’est Beethoven en personne qui s’abandonne à ses divines extases, et recueille, chemin faisant, tous les bruits mélodieux du fleuve, de la montagne et de la plaine ; c’est Schouber [sic], mélancolique rêveur, qui se raconte tout bas les drames amoureux de la jeunesse, drames fugitifs que le musicien veut retenir et qui l’emporte on ne sait où ? dans l’idéal.

   » Silence, c’est Meyerbeer qui vous raconte ce que disent les fantômes de la nuit à la pâle clarté de la lune des morts ; silence, c’est Rossini, ce voltairien, qui chante et qui vous fait pleurer en se moquant de vous-même ; silence, c’est l’Allemagne qui entonne le chant de guerre à la suite du grand poète Kœrner, c’est Mozart qui passe à la suite du Don Juan, sentant l’odeur des femmes ; silence enfin, ou plutôt battez des mains et suivez-là, si vous pouvez, d’un pas joyeux, car c’est la valse hongroise, tour-à-tour grave et folle, pétulante et posée amoureusement, penchée sur le jeune cavalier qui l’emporte. Oh ! que de joie, que de terreur, que de pitié, que d’héroïsme amoncelés dans ces quatre morceaux de bois si admirablement taillés par Erard. Eh bien ! le croirez-vous, cette fois, Beethoven et Schouber, Meyerbeer, Rossini et Mozart, l’Autriche et la Hongrie, la valse de la guerre, tout cela ne porte qu’un seul et même nom aujourd’hui, le nom glorieux, retentissant et populaire de Frantz Listz. »

Responsable de publication: Claude Knepper (CNRS) - Réalisation: Philippe Brunet  - Copyright © www.liszt.cnrs.fr